FIèVRE HéMORRAGIQUE DE CRIMéE-CONGO : SYMPTôMES, TRAITEMENT ET PRéVENTION DE CETTE INFECTION VIRALE GRAVE

Détectée en France pour la première fois en 2023 sur des bovins, la fièvre hémorragique de Crimée-Congo est une maladie virale extrêmement sévère avec risque létal. Elle relève des zoonoses, c’est-à-dire que le virus se transmet des animaux (tiques, animaux d’élevage) vers l’homme.

L’expansion de cette maladie, limitée initialement à l’Afrique et à quelques pays européens (Turquie, Bulgarie et plus récemment Espagne) est favorisée par le changement climatique.

En France, une première détection du virus hémorragique de Crimée-Congo a été confirmée au mois d'octobre 2023 sur des tiques collectées dans des élevages bovins dans les Pyrénées Orientales. Il circule aussi dans les élevages de Corse, comme l'explique l'étude publiée dans la revue américaine Emerging Infectious Diseases. L’Agence Régionale de Santé (ARS) de Corse précise dans un communiqué daté du 24 avril 2024, que "la présence du virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo est connue en Corse depuis plusieurs années chez les bovins". Et que, "ce qui est nouveau, c’est la détection de la maladie chez les tiques, insectes vecteurs et donc rendant la maladie potentiellement transmissible à l’homme".

L'Agence de sécurité sanitaire (Anses) et le Haut conseil de Santé Publique ont été saisis suite à ces cas pour élaborer des recommandations. En attendant, les autorités sanitaires conseillent de suivre les recommandations visant à se protéger des tiques.

Néanmoins, rassurez-vous, aucun cas n’a été détecté chez l’humain en France à ce jour.

Fièvre hémorragique de Crimée-Congo, de quoi s’agit-il ? Définition

La fièvre hémorragique de Crimée-Congo est une infection virale grave. Elle est due à un virus de la famille des Nairoviridae et du genre Orthonairovirus. Elle a pour hôte naturel les tiques, surtout les tiques de la famille Hyalomma spp. Le virus peut être transmis par une piqûre de tique, ou par le contact direct avec le sang contaminé d’humains ou d’animaux sauvages. Il s’agit d’une maladie endémique en Afrique, en Asie, au Moyen-Orient, au sud de l’Europe ou encore dans les Balkans. Ces dernières années, le réchauffement climatique et le commerce international de bétail ont conduit ce virus à s’étendre à l’Europe (notamment en Espagne et en Corse chez les ovins, bovins et caprins), précise la Revue du praticien. Les individus à risque sont par conséquent les personnes qui ont des contacts fréquents avec les animaux sauvages et le bétail, c’est-à-dire les éleveurs, les vétérinaires de campagne, les employés des abattoirs…, ainsi que les personnes potentiellement au contact des tiques, tels les chasseurs, les gardes forestiers, les randonneurs. La fièvre hémorragique de Crimée-Congo génère une fièvre brutale et des hémorragies, pouvant conduire au décès dans 10 à 40 % des cas, selon la souche de virus à laquelle on est confrontée.

Comment se transmet la fièvre hémorragique de Crimée-Congo ?

La contamination par le virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo peut se faire de plusieurs façons. Tout d’abord, et c’est là le mode de contamination principal pour l’homme comme pour l’animal, par des piqûres de tiques, de la famille des Ixodidae, essentiellement celles du genre Hyalomma. À l’état de larves, ces tiques sont hébergées surtout chez les oiseaux, les hérissons et les lièvres. Puis, à l’état de nymphes, les tiques se cherchent un nouvel hôte, et choisissent le plus fréquemment un grand mammifère (ovins, bovins, animaux sauvages…). Mais elles peuvent aussi être hébergées par des chats, des chiens, des souris ou des rats. Le virus se transmet alors à l’homme par des morsures de tiques attrapées au contact de ces animaux. Moins fréquentes sont les contaminations par contact direct avec le sang ou les fluides corporels des individus ou des animaux porteurs du virus. Dans tous les cas, des mesures barrières s’imposent.

Quels sont les symptômes de la fièvre de Crimée-Congo ?

Les symptômes de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo sont d’intensité variable selon les individus. Toutes les infections ne donnent pas lieu à des symptômes, de sorte que la contamination par ce virus peut passer complètement inaperçue. En cas de symptômes légers au départ, une errance diagnostique peut survenir, le médecin associant par erreur les symptômes à un syndrome grippal. On distingue traditionnellement quatre phases dans cette pathologie :

  • La phase d’incubation : sa durée dépend de la façon dont la personne a été contaminée. Si la contamination est due à une piqûre de tique, le délai d’incubation est de 3 à 6 jours et au maximum de 9 jours, précise l’OMS. En cas de contamination par contact avec du sang contaminé ou des tissus infectés, ce délai est de 5 à 6 jours et au maximum de 13 jours, toujours selon cette même source.
  • La phase préhémorragique : elle s’étend sur 1 jour à 1 semaine. Les symptômes sont ceux d’un syndrome grippal. La personne a une fièvre soudaine, des courbatures, des vertiges, une raideur dans la nuque, des céphalées, des nausées et des douleurs abdominales. Ainsi qu’un afflux du sang (hyperémie) au niveau du visage, du cou et de la poitrine et une confusion mentale.
  • La phase hémorragique : selon les cas, elle intervient dans les 3 à 6 jours après les premiers symptômes de la maladie. Sous la peau apparaissent de petits points rouges de la forme d’une tête d’épingle (pétéchies) de même que des ecchymoses et des hématomes. À la palpation, l’on constate que le foie a augmenté de volume, on parle alors d’hépatomégalie. La personne est sujette par ailleurs à des saignements des gencives, du nez, de la peau à l’endroit des piqûres, ainsi qu’à de la tachycardie. On observe du sang dans les urines et dans les selles. Dans les formes de fièvre hémorragique de Crimée-Congo avec des complications graves, on observe une forte dégradation de la fonction rénale, une nécrose du foie, une hémorragie cérébrale ou une insuffisance pulmonaire. Dans ces derniers cas, le pronostic vital est engagé. La mort survient alors généralement au cours de la deuxième semaine dans 10 à 40 % des cas.
  • La convalescence : pour les patients qui s’en sortent, la convalescence est le plus souvent de 15 jours à 3 semaines après les premières manifestations de la maladie, mais la récupération totale du patient peut prendre jusqu’à une année. Parmi les cas observés à travers le monde, aucun cas de rechute n’a été constaté.

Quel diagnostic et traitements de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo ?

Pour poser le diagnostic de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo, le médecin se base sur l’examen clinique du patient, mais aussi sur des analyses. Cela passe notamment par une analyse de sang. Dans des conditions de confinement biologique extrême en raison des risques élevés de contamination, cela peut aussi passer par la biologie moléculaire ou la culture virale.

Si le diagnostic confirme l’infection au virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo, il faut isoler le patient, pour éviter autant que possible qu’il contamine d’autres personnes. Il n’existe à ce jour aucun traitement spécifique de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo. La prise en charge médicale va donc consister surtout à soulager les symptômes du patient. Pour cela, les médecins prescrivent des antalgiques, des antipyrétiques, des antiémétiques, des corticoïdes et des antidiarrhéiques. De même que des produits sanguins : du plasma frais congelé (PFC), des plaquettes, des érythrocytes (globules rouges). Par ailleurs, des antiviraux de type ribavirine, par voie orale ou par voie intraveineuse, donneraient des résultats satisfaisants en étant prescrits une dizaine de jours. Faute de parvenir à guérir cette maladie avec un traitement médicamenteux, il est donc conseillé d’insister sur les moyens de prévention.

Existe-t-il un vaccin contre la fièvre hémorragique de Crimée-Congo ?

À ce stade des avancées scientifiques, il n’existe pas de vaccin pour se prémunir contre la fièvre hémorragique de Crimée-Congo, ni pour l’homme ni pour l’animal. Certains pays comme l’ex-URSS et la Turquie ont testé un vaccin depuis les années 1970, mais il n’a pas été jugé suffisamment efficace pour être étendu. La recherche pour l’élaboration d’un vaccin est en cours, précise la revue Médecine/Sciences, vaccin centré sur la tique elle-même et visant à l’empêcher de se nourrir. Si ce vecteur était neutralisé, alors la propagation du virus le serait aussi. L’OMS évoque de même des avancées sur un vaccin obtenu à partir de la cervelle de souris, et expérimenté pour l’heure à petite échelle seulement.

Comment se protéger de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo ?

Les mesures de prévention de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo sont essentielles pour limiter les risques de propagation du virus. Elles empruntent divers canaux, rappelle l’Organisation mondiale de la santé :

  • La lutte contre la maladie de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo chez les tiques et les animaux hôtes des tiques : elle passe par le recours aux acaricides, produits toxiques pour les tiques, qui empêchent leurs larves de se développer. Il s’agit par ailleurs de mettre les animaux destinés à l’abattoir systématiquement en quarantaine deux semaines avant leur abattage, et de leur donner un traitement à base de pesticide à cette occasion.
  • La prévention au niveau humain : il s’agit de porter des vêtements couvrants (pantalons longs, hauts avec manches) et de couleur claire (couleur sur laquelle les tiques se détectent plus facilement). Mais aussi de vaporiser des répulsifs anti-tiques homologués sur les vêtements et sur la peau. Si malgré ces précautions la personne est mordue par une tique, il faut l’enlever au plus vite et désinfecter la morsure. Enfin, dans la mesure du possible, il faut éviter de se rendre dans les lieux où les tiques se multiplient, surtout aux saisons où les tiques sont les plus actives, c’est-à-dire au printemps et à l’automne.
  • La prévention de la contamination de l’animal à l’homme : en cas de contact avec les animaux dans une région endémique, il est vivement conseillé de porter des gants et des vêtements couvrants. Et de bien se laver les mains après ce contact.
  • La prévention de la contamination interhumaine : pour éviter d’être contaminé par le virus de la fièvre Crimée-Congo, il est recommandé de respecter les mesures barrières. C’est-à-dire qu’il ne faut pas approcher, sauf obligation si l’on est soignant, les personnes atteintes par le virus. En ce qui concerne les soignants, et le personnel amené à manipuler des prélèvements sur les malades, les soins doivent être prodigués en portant des gants et des tenues de protection, et un lavage des mains systématique doit avoir lieu après chaque contact avec le patient, ou avec des échantillons de sang ou de fluides de ce dernier.

Sources :

INRS, La Revue du praticien, Infectiologie, Manuel Merck, Médecines/Sciences, Organisation mondiale de la santé

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